Module & cinétique
FICHE TECHNIQUE R&D
Contrôle des facteurs climatiques, capteurs de présence
Ces recherches visent à concevoir de nouveaux dispositifs « doux » permettant de contrôler les facteurs climatiques d’un espace sans pour autant avoir recours à des enveloppes fermées.
Dans certains cas, ces dispositifs prennent la forme de ponctuations, de colonies d’objets, dont l’assemblage[1] plus ou moins serré confère à l’espace des propriétés combinatoires. Dans d’autres cas, ils s’appuient sur des astuces de pliages, des systèmes de rails motorisés pour libérer l’espace de toute limite physique. Ils peuvent être commandés par des capteurs de présence ou des commandes centralisées. Mais souvent, le but recherché est qu’ils soient mécaniquement actionnés par les éléments naturels eux-mêmes. Loin d’une fascination pour des systèmes sophistiqués, domotiques et fragiles, nous privilégions donc les technologies « low-tech », débrayables, réversibles, et robustes.
Espaces virtuels mobiles / Espace physique référent
Nous sommes aujourd’hui entourés et assistés par une technologie mobile de communication. Les espaces physiques, urbains, domestiques, de services et de loisirs, deviennent des plateformes multiusages, ou les usagers passent d’une bulle collective à une bulle privée en l’espace d’un clic.
Il nous semble qu’afin d’accompagner cette évolution de la société, les espaces bâtis doivent en contrepartie offrir un socle de référence à ces usages partagés. Les recherches de « modules et cinétique » s’inscrivent dans ce postulat : afin de contrecarrer l’éparpillement de notre attention absorbée par les nouveaux espaces virtuels, l’architecture physique doit nous offrir un espace inscrit, lisible,équilibré et unitaire. Cet espace réuni dorénavant des fonctions, domestiques ou publiques, autrefois discontinues.
Formes secondaires
On nomme ici forme secondaire une forme contenue, un dispositif « soft » démontable et réversible, l’opposant ainsi au « hard » du bâti. Dans cet espace unifié, il est nécessaire d’introduire des dispositifs permettant d’organiser une variété d’usages. Ces dispositifs empruntent leurs formes à des domaines autres que l’architecture : le design industriel, la scénographie, l’équipementier ou l’industrie textile.
À Turin, des constructions de chaises envahissent la place centrale afin de fournir les services nécessaires aux visiteurs du congrès de l’UIA. À Morzine, de lourds rideaux de feutre, pliés en accordéons, permettent à l’espace central d’une villa d’être subdivisé. À Athènes, des colonies de lentilles d’eau géantes prennent place durant les Jeux olympiques pour révéler les lieux forts de l’évènement[2]. À Paris, des microarchitectures évolutives s’emparent du lieu culturel « le104 », et s’adaptent aux usages tels des grands phasmes aidés par l’homme. À Tokyo, des diffuseurs d’air aident les fumeurs de l’aéroport à se placer en bonne intelligence vis-à-vis du non-fumeur, orientés par leurs ondulations au gré du courant d’air généré[3].
Dessin de systèmes précis & Démarche scénographique
Afin de mettre au point ces systèmes légers et complexes, un changement de l’échelle d’étude est nécessaire. Afin de mettre au point les dessins d’exécution de ces systèmes, l’agence JKA s’entoure de compétences spécifiques, dans le domaine du design industriel (Jérome Aich – FUGA), de la serrurerie fine[4] (DEPUIS 1920 SARL — Aubervilliers), ou du design textile (Florinda Donga).
Cette démarche s’apparente sous certains aspects à un travail scénographique. C’est en effet grâce au travail aux cotés de Pascal Payeur (le Scénoscope) pour le dessin d’exécution de manipulations interactives et leur suivi en atelier de fabrication (exposition l’argent, le PASS 2003), que la complémentarité entre bâti et microarchitectures est devenu un thème structurant du travail de l’agence.
Module 01
Ponctuations de l’espace
Système signalétique et d’aspiration des fumées de cigarette en milieu urbain
Japan tobacco – SMOKER’S STYLE COMPETITION 2006
Le projet se veut une alternative au cloisonnement fumeur / non-fumeurs dans des lieux publics intérieurs (aéroports, halls de réception, bureaux) ou extérieurs (quais de gare[7], abris bus). Plutôt que d’axer cette recherche sur l’efficacité de systèmes de purification de l’air, très en vogue au Japon, nous choisissons de travailler sur la notion de politesse et de prévenance.
Tout comme la limaille de fer exprime les champs magnétiques générés par des aimants (cf.image de référence[8]), des émetteurs flexibles vont matérialiser un flux d’air traité, ainsi que les polarités des zones fumeurs, proches des récepteurs[5]. Fumeurs et non-fumeurs peuvent alors se positionner les uns par rapport aux autres et renouer le dialogue[6].
Interface phénoménologique & climatique
Jeux olympiques Athènes 2004
À la manière de lentilles d’eau sur la surface d’un étang[12], des éléments gonflables[9] viennent investir les espaces publics. Par leur présence, ils annoncent les événements ou révèlent les rassemblements. Le citadin ou visiteur est ainsi mis au centre de l’action. Alors que durant la journée ils jouent le rôle de régulateur climatique créant une ambiance ombragée[11]. La nuit, ils deviennent réactifs au passage et s’illuminent proportionnellement à l’affluence depuis les tiges jusqu’à la nappe supérieure.
Situés à une hauteur constante, les ballons forment alors une nappe plus ou moins dense. Ils se développent organiquement selon les moments forts des jeux. Vue depuis le Parthénon, l’organisation de ces indicateurs semble émerger du tissu urbain. L’intensité des pôles d’activité sera également clairement visible depuis l’arrivée en avion des visiteurs, offrant ainsi une interface entre l’individu et la ville entière[10].
Module 02
Agencements modulaires
Mobilier urbain utilisé comme module constructif
UIA WORLD CONGRESS 2008 Turin – Construction évènementielle – Ferpect : J.Koempgen + J.Aich
Le projet est un ensemble architectural composé d’un amoncellement de chaises. Cet ensemble colonise l’espace de la place centrale de Turin[13]. Les architectures prennent la forme de passages intégrant les différentes fonctions nécessaires à la communication de l’évènement[14].
Le Congrès de l’UIA, Turin 2008 a pour thème le thème : transmettre l’architecture — la démocratie urbaine. Les chaises sont dessinées de manière à pouvoir s’assembler les unes avec les autres[15] [17] et ainsi constituer l’espace social et communicant de l’info point. Le plan, par son éclatement en différents empilements de chaises, parle de l’individu au sein du groupe comme un constructeur de l’espace et de la démocratie[16].
un projet renouvelable
Finalement, le projet parle aussi du cycle de cet élément constructif de sa fabrication à sa réutilisation, avant pendant et après l’évènement. Car, une fois la manifestation achevée, ces éléments constructifs séparés récupèrent leurs statuts de chaise, et seront répartis dans la ville pour être réutilisés comme mobilier urbain.
Évolutions d’espèces microarchitecturales
Le 104 : évènement innaugural, art «in process» – Ferpect : J.Koempgen + F.Biais + J.Aich
Nous proposons un travail de recherche et d’expérimentation autour du thème : « microarchitectures, échelles intermédiaires entre l’homme et le grand volume du bâtiment ». Il s’agit pour nous de créer des « guillemets » enveloppant l’échelle du corps humain, interface entre l’espace public du centre d’art et l’espace de l’intime de l’individu. L’expérience est menée comme une étude génétique portant sur des « espèces architecturales » élaborées dans un atelier ouvert (le laboratoire[22]). Celles-ci « habitent » ensuite la nef centrale où elles sont testées par les visiteurs[20]. L’idée d’un travail par tâtonnements, par mutations successives, permet en fait d’expérimenter une architecture fictionnelle, évolutive et vivante. C’est alors à l’usager d’imaginer de nouvelles pratiques de l’espace.
formes évolutives, phylogenèse :
La phylogenèse est une discipline qui a pour objet d’étudier la formation et l’évolution des espèces animales[21] et végétales afin d’établir leur parenté. La recherche de formes architecturales par « modifications génétiques »[23] successives nous amène à utiliser des systèmes modulaires, des accumulations, tout en conservant un aspect biomimétique[19]. L’intimité et l’individualité relative des cellules conduisent à manipuler des formes telles que celles de la capsule, du cocon, du nid, de l’habitacle, et de la grappe[24]. L’ouverture relative de ces espaces oriente les études vers des systèmes pivotants, des articulations.
Cinétique
Dispositifs coulissants
Portail coulissant rotatif manuel à trois ventaux
Plusieurs ambitions du projet ont amené à confectionner un portail véhicule coulissant et rotatif à trois ventaux. L’étroitesse de la parcelle, le dénivelé et le souhait de percevoir les places de stationnement comme partie intégrante du jardin[27], nous demandaient en effet de ménager une ouverture quasi intégrale sur la parcelle, sans avoir de dégagement pour la porte[25].
Le portail a ainsi fait l’objet de plans détaillés au 1/25° [28], et la réalisation de la serrurerie, d’une collaboration étroite avec l’entreprise DEPUIS 1920. Les pièces du système coulissant sont de type ROTEM : rail 62x55mm, chariots 4 galets acier (charge max 400kg / élément), et rail courbe même section de rayon r=80cm, suspendus à un IPE 20cm par des supports à tige courte. Les vantaux de 150 cm de largeur sont composés de tubes 40mm; le remplissage ajouré d’une tôle 15/10e et de carrés d’acier de 10mm[26].
Rideaux de feutre en accordéon à commande centralisée
Dans un autre projet, nous avons eu recours à un système coulissant à motorisation centralisée, remplissant cette fois-ci la fonction de séparation intérieure. Cette maison, située à Morzine, en Haute-Savoie, doit permettre de recevoir quatre familles qui partageront un espace central généreux. Cet espace, dont le plan « en croix » s’ouvre sur les quatre façades, accueille la salle à manger, le salon, l’espace cheminée, les entrées[29], ainsi que l’ensemble des distributions de la maison.
De lourds rideaux en feutre (en loden) se rangent en accordéon dans des caissons intégrés à l’architecture intérieure, et permettent de séparer à souhait les espaces en fonction des utilisations de la maison[31] [32]. Ils mettent ainsi en place une hiérarchie entre l’espace central, les paliers latéraux plus privatifs menant aux couchages, et un salon annexe.
Les Systèmes 6300 de motorisation de G-Rail[30] sont ici utilisés à commande filaire centralisée. Les rideaux en loden plissé cousu sont confectionnés sur mesure par Florinda Donga, sur un pas de 19 cm. Conception JKA + FUGA.
Séparation translucide coulissante en « bulle pack »
Installation temporaire à la Galerie de l’ESA, Strasbourg
L’artiste investit une galerie pour deux semaines et y peint ses toiles « en direct ». Il veut cependant pouvoir s’isoler de la rue par moments pour se concentrer.
L’idée est de lui fournir un filtre enrichissant cette relation (vu — être vu) avec le passant, en installant un rideau courbe semi-transparent autour de la vitrine[35]. Les configurations changeantes[36] permettent de mettre en valeur tour à tour une pièce centrale, les tableaux exposés sur le mur en contournant le rideau depuis l’entrée, ou bien le travail du peintre dans le deuxième espace. Le dispositif[33] [34] met en valeur le travail sur la couleur des tableaux puis force dans un second temps à un contact de proximité avec le trait.